L’atelier Kino 2019 du festival Résistances – Mon expérience !
Bonjour à toutes et à tous ! Après mon article sur la LocJam, je partage avec vous mon retour sur l’atelier Kino qui a eu lieu durant l’édition 2019 du festival Résistances. Ce sera d’ailleurs l’occasion pour moi d’aborder la question de l’accessibilité audiovisuelle au cinéma, puisque c’était l’un des objectifs de cet atelier. Cela me permettra également de vous expliquer en quoi ce genre d’expérience professionnelle a été enrichissante pour moi, en tant que traducteur.
Résistances : un festival de cinéma en Ariège
Avant de vous parler de l’atelier Kino, j’aimerais d’abord vous présenter Résistances. Il s’agit d’un festival de cinéma qui a lieu tous les étés à Foix, en Ariège. Pendant dix jours, la préfecture ariégeoise vit au rythme de la programmation cinématographique choisie avec soin par les différents comités du festival. Que ce soit à l’Estive, au Rex ou en plein air, le septième art est à l’honneur via différentes thématiques. L’année dernière, les thématiques suivantes étaient à la une du festival :
- La place de l’art dans notre société ;
- La question de l’immigration au sein de l’Union européenne ;
- La mort et tout ce qui l’entoure (comme l’euthanasie) ;
- L’écologie et son importance à l’heure actuelle ;
- L’Islande (qui était le pays mis en avant durant l’édition 2019).
Par ailleurs, j’ai eu l’opportunité d’adapter certains films diffusés durant le festival pour le public sourd et malentendant, dont vous pouvez consulter la liste ici. En effet, les organisateurs du festival attachent beaucoup d’importance à l’accessibilité audiovisuelle, en témoignent les séances spéciales destinées aux spectateurs sourds, malentendants et/ou malvoyants. En tant que traducteur, j’ai même pu me rendre compte des difficultés que peut impliquer cette problématique, notamment au niveau du sous-titrage.
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le site Internet du festival.
L’atelier Kino : quand les réalisateurs et les traducteurs se rencontrent
Avant de participer à l’atelier Kino, je n’avais jamais entendu parler de ce concept. J’ai pu donc découvrir sur place de quoi il s’agissait. Pour vous le présenter brièvement, c’est la rencontre entre différentes cultures, ici entre des Français et des Islandais (l’Islande étant au cœur de l’édition 2019 de Résistances, comme je le disais plus haut). Les premiers jours, les vingt participants se rencontrent et font connaissance. Puis, selon leurs affinités, ils forment des équipes, toujours dans cette optique pluriculturelle. Enfin, chaque équipe doit réaliser et monter un court-métrage en un temps limité, avant de laisser la place aux traducteurs bénévoles (dont je faisais partie l’an dernier).
Concernant les courts-métrages, ils devaient aborder chacun l’une des thématiques mises en avant durant le festival. Celui que j’ai adapté s’appelle Flashback et son sous-titrage était particulièrement corsé (je vous explique pourquoi plus bas).
Vous pouvez regarder les différents courts-métrages réalisés durant cet atelier Kino ici.
Un sous-titrage bilingue accessible
Maintenant que j’ai contextualisé cet article, il est utile de rappeler rapidement ce qu’est le sous-titrage SME. Il s’agit d’adapter une œuvre audiovisuelle pour les spectateurs sourds et malentendants français. Cela veut donc dire que, en plus des normes habituelles du sous-titrage, il faut appliquer des normes spécifiques au sous-titrage SME. Elles sont ainsi nécessaires pour faciliter la compréhension de l’œuvre audiovisuelle pour les spectateurs sourds et malentendants.
Pour en savoir plus sur les normes du sous-titrage SME, vous pouvez consulter la charte du CSA en cliquant ici.
Néanmoins, mes collègues et moi avons décidé d’adopter une règle « spéciale » concernant le sous-titrage des courts-métrages de l’atelier Kino 2019. En effet, les spectateurs de Résistances étant français, mais aussi étrangers, le sous-titrage allait donc être à la fois en français et en anglais. On a donc choisi :
- De mettre une langue par ligne ;
- De coloriser les sous-titres français en blanc et les sous-titres anglais en jaune ;
- D’« alléger » le sous-titrage SME, en passant outre les placements de sous-titres.
En revanche, on a souhaité garder les caractères en majuscules (pour les personnages à l’écran parlant en même temps) et les indications sonores (comme la musique). Concernant Flashback, je n’ai pas rencontré ce genre de difficulté. À vrai dire, c’est un autre genre de difficulté auquel j’ai dû faire face !
J’ai utilisé les logiciels Aegisub et Subtitle Editor (ce dernier est uniquement disponible sous Linux). Si vous souhaitez en savoir plus, cliquez ici et là.
Flashback : un court-métrage trilingue
Flashback est un court-métrage qui aborde la vie, ses joies et ses peines. Ses réalisateurs sont ainsi partis à la rencontre de différents individus (français et islandais) pour les interroger sur les meilleurs et les pires moments de leur existence, et sur comment ils imaginaient leur avenir. Comme je le disais précédemment, la principale difficulté de ce film était son multilinguisme : on y entend aussi bien du français et de l’islandais. On peut y voir aussi un homme pratiquer la langue française des signes (LSF).
Mais pourquoi le sous-titrage de l’islandais et de la LSF m’ont-ils posé problème ?
- Ce sont deux langues avec lesquelles je ne suis pas familier.
- Contrairement aux langues latines comme l’espagnol et l’italien, dont la construction grammaticale et certains mots sont proches de la langue française, l’islandais diffère beaucoup au niveau grammatical, ce qui peut la rendre difficile à comprendre au premier abord.
- Quant à la LSF, ce n’est pas une langue orale, mais un langage visuel et gestuel : on ne « parle » pas la LSF, on la « signe ».
À partir de là, outre les contraintes techniques habituelles liées au sous-titrage — le nombre de caractères par seconde et par ligne, le nombre d’images entre chaque sous-titre —, il me fallait résoudre cette double difficulté linguistique. Ajoutons-y également la problématique de l’adaptation des dialogues en anglais (vu qu’il s’agissait d’un sous-titrage bilingue). Car oui, même s’il s’agit de l’une de mes langues sources et que je la maîtrise, je ne traduis pas pour autant vers l’anglais. Cependant, les sous-titres étaient déjà traduits en anglais et une traductrice-interprète bénévole m’a prêté main-forte pour les réviser. En effet, étant données les modifications à effectuer pour les passages en islandais et en LSF, il serait nécessaire de faire des ajustements dans la partie anglaise du sous-titrage.
Adapter des sous-titres à partir de l’islandais et de la LSF
Concernant les modifications à apporter aux sous-titres en islandais et en LSF, elles concernaient surtout :
- Le calage des sous-titres, pour que ces derniers commencent en même temps que le son ou les signes (= les personnes qui parlent/signent à l’écran) ;
- La retraduction française de certains sous-titres, qui n’étaient pas corrects par rapport à la langue source.
Comme je suis totalement novice dans ces deux langues, j’ai fait appel à l’une des réalisatrices islandaises du court-métrage et à un interprète en LSF pour m’aider à bien caler les sous-titres. Par ailleurs, en plus d’avoir recours à mes compétences linguistiques et techniques, il a fallu que je sois organisé, rapide (la mission durait 48 heures) et que je travaille en équipe. Car oui, être traducteur ne veut pas forcément dire travailler tout seul devant son ordinateur, huit heures par jour. L’intérêt de cet atelier résidait effectivement dans la communication, l’entraide et le partage culturel. Par conséquent, malgré la difficulté de cette tâche, j’ai beaucoup appris sur le métier en peu temps (même si on se forme à la traduction toute notre vie).
Regardez le court-métrage Flashback :
Conclusion : un atelier professionnel enrichissant
Pour résumer mon avis sur l’atelier Kino du festival Résistances 2019, c’était une expérience vraiment enrichissante au niveau professionnel. Cela m’a permis d’être davantage dans le bain, en faisant face aux conditions de travail réelles du métier (note de l’auteur : j’étais en stage l’année dernière, donc encore en formation). J’ai particulièrement apprécié l’esprit d’entraide qui y régnait et la passion commune qui animait tous les participants : le septième art. J’ai donc été heureux de participer et de découvrir ce qu’était un atelier Kino, et d’avoir mis mes qualités de traducteur audiovisuel aux services du festival.
Je conclurai ce billet comme j’ai conclu mon article sur la LocJam : si vous êtes étudiant(e), je vous encourage fortement à vivre ce genre d’expérience professionnelle, car vous renforcerez vos compétences techniques et linguistiques, en plus d’exercer le métier sur le terrain. Et au niveau humain, ça vous apportera beaucoup également !
Et vous, avez-vous déjà participé à un atelier Kino en tant que traducteur(rice) audiovisuel(le) ? Si oui, qu’en avez-vous tiré ? N’hésitez pas à partager votre propre expérience dans les commentaires !